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Au Royaume des Femmes en livre-audio
Posté le 11 mars 2008
Le livre-audio connaît, paraît-il, une vogue grandissante. L’idée me séduisait depuis longtemps. C’est donc avec enthousiasme que j’ai accepté la proposition d’Antoinette Fouque : enregistrer des extraits de mon dernier roman, « Au Royaume des Femmes ».
Expérience passionnante, mais épuisante. Au registre de la fatigue : quatre bonnes journées enfermée en sous-sol, dans un studio sombre, derrière une vitre épaisse et dans la seule compagnie d’une petite tasse de thé… Par bonheur, l’enregistrement s’est déroulé pendant la grève des transports. Donc sensation d’étoupe entre la réalité et moi, et soulagement d’échapper au bordel général… Enfin, durant ces longues heures où je lisais mon texte, j’étais très vite ailleurs. Dans l’air raréfié du Tibet oriental, sur les cols, avec mon héros Joseph Rock, à chercher le mythique Royaume des Femmes au fond des lamaseries réfrigérées par des hivers interminables, ou dans les forêts où, entre pandas et wapitis, s’épanouissaient parfois ses chères et rares pivoines…Donc durant tout cet enregistrement, j’ai revécu au souffle près ( et parfois au manque de souffle près, comme à 5000 mètres) son utopie du Royaume des Femmes. Son rêve de la Montagne, ses fantasmes infantiles, son secret, ses hontes, ses ridicules, son exaltation, son déchiffrement émerveillé de la langue pictographique d’un peuple en voie d’extinction. Oui, j’étais là-bas, à nouveau. Et avec lui. A côté de son gramophone, à écouter « Donna e mobile » au milieu du désert d’herbe. Ou au milieu de ses malles, snobé par le petit baluchon d’Alexandra David-Néel. Ou partageant avec le Prince de Choni un sorbet au dentifrice mentholé agrémenté de poulpe en conserves…Oui, je voulais, mais cette fois-ci avec ma voix, vous entraîner là-bas…
J’ai le CD devant moi, mais je ne l’ai pas encore écouté. Je ne sais pas si je le ferai : je n’aime pas ma voix. C’est banal, je sais. Je me demande d’ailleurs pourquoi cette détestation est si fréquente. On dit souvent que la voix trahit. Oui, sans doute : elle nous révèle dans notre nudité psychique.
On peut malgré tout aborder la question d’une autre façon. Non pas dire qu’elle nous trahit, mais qu’elle nous traduit. Qu’elle livre à l’autre, plus sûrement que d’autres signaux, ce que nous sommes profondément. A lui de recevoir cette vérité, ou de la refuser. A lui de l’aimer ou de la détester. Et dans tous les cas, à notre Narcisse de s’en accommoder.
Pour l’instant, le mien n’est pas tout à fait prêt. Malgré tout, avec ce CD, je suis heureuse de cette nouvelle façon de partager avec les autres l’intensité de la quête que j’ai vécue, là-haut, sur le Toit du Monde, sur les traces du fabuleux Joseph Rock.
P.S. : va-t-on dire désormais qu’un auteur a un « audiorat » comme on a dit jusqu’à maintenant qu’il a un « lectorat » ?
Expérience passionnante, mais épuisante. Au registre de la fatigue : quatre bonnes journées enfermée en sous-sol, dans un studio sombre, derrière une vitre épaisse et dans la seule compagnie d’une petite tasse de thé… Par bonheur, l’enregistrement s’est déroulé pendant la grève des transports. Donc sensation d’étoupe entre la réalité et moi, et soulagement d’échapper au bordel général… Enfin, durant ces longues heures où je lisais mon texte, j’étais très vite ailleurs. Dans l’air raréfié du Tibet oriental, sur les cols, avec mon héros Joseph Rock, à chercher le mythique Royaume des Femmes au fond des lamaseries réfrigérées par des hivers interminables, ou dans les forêts où, entre pandas et wapitis, s’épanouissaient parfois ses chères et rares pivoines…Donc durant tout cet enregistrement, j’ai revécu au souffle près ( et parfois au manque de souffle près, comme à 5000 mètres) son utopie du Royaume des Femmes. Son rêve de la Montagne, ses fantasmes infantiles, son secret, ses hontes, ses ridicules, son exaltation, son déchiffrement émerveillé de la langue pictographique d’un peuple en voie d’extinction. Oui, j’étais là-bas, à nouveau. Et avec lui. A côté de son gramophone, à écouter « Donna e mobile » au milieu du désert d’herbe. Ou au milieu de ses malles, snobé par le petit baluchon d’Alexandra David-Néel. Ou partageant avec le Prince de Choni un sorbet au dentifrice mentholé agrémenté de poulpe en conserves…Oui, je voulais, mais cette fois-ci avec ma voix, vous entraîner là-bas…
J’ai le CD devant moi, mais je ne l’ai pas encore écouté. Je ne sais pas si je le ferai : je n’aime pas ma voix. C’est banal, je sais. Je me demande d’ailleurs pourquoi cette détestation est si fréquente. On dit souvent que la voix trahit. Oui, sans doute : elle nous révèle dans notre nudité psychique.
On peut malgré tout aborder la question d’une autre façon. Non pas dire qu’elle nous trahit, mais qu’elle nous traduit. Qu’elle livre à l’autre, plus sûrement que d’autres signaux, ce que nous sommes profondément. A lui de recevoir cette vérité, ou de la refuser. A lui de l’aimer ou de la détester. Et dans tous les cas, à notre Narcisse de s’en accommoder.
Pour l’instant, le mien n’est pas tout à fait prêt. Malgré tout, avec ce CD, je suis heureuse de cette nouvelle façon de partager avec les autres l’intensité de la quête que j’ai vécue, là-haut, sur le Toit du Monde, sur les traces du fabuleux Joseph Rock.
P.S. : va-t-on dire désormais qu’un auteur a un « audiorat » comme on a dit jusqu’à maintenant qu’il a un « lectorat » ?