Sur France 2, interviews des intégristes musulmans qui viennent de lancer une fatwa sur Taslima Nasreen. " Il faut qu'on lui coupe les mains comme aux voleurs". Exilée à Calcutta, elle se retrouve une fois de plus dans une souricière. Elle a dû abandonner son appartement, n'a plus de quoi vivre et, depuis quelques semaines, est obligée de vivre dans une cache, comme il y a quinze ans au BanglaDesh, du temps de la première offensive des mollahs... Contrairement à ce qu'assure une rumeur tenace dans les milieux littéraires européens, la menace qui plane depuis des années sur l'écrivaine du BanglaDesh n'est donc pas bidon.

Je réunis illico tous mes souvenirs de Taslima. La première fois que je l'ai rencontrée, c'est à Stockholm, expédiée par Paris-Match aux fins de l'interviewer. Pas commode, la Taslima! Mais bigrement courageuse. Je revois aussi l'armada de gardes du corps qui nous collaient constamment au train... En dehors de leurs revolvers et de leur carrure de déménageurs, ce qui m'avait le plus frappée, c'est sa profonde nostalgie. Sa famille, son pays, ses repères lui manquaient. Une exilée.

Quand Taslima Nasreen, dans les années 2000, s'est établie à Calcutta, j'ai respiré pour elle. Sa famille pouvait la visiter, et les repères culturels de l'Inde ne sont pas si éloignés de ceux du Bengla-Desh. Et voilà qu'une fois de plus, fatwa sur Taslima. Mais cette fois, l'Occident l'abandonne, au nom d'une sale rumeur: mais non, voyons, tout çà, rien qu' un ciné qu'elle a monté pour faire monter ses tirages! lle ne vend plus de livres et c'est bien mérité: c'est un mauvais écrivain! C'est exact,Taslima Nasreen n'a pas le talent romanesque de Salman Rushdie. Et puis elle est un peu pataude, sans compter son caractère de cochon. Et alors? La solidarité humaine se mesure-t-elle à l'aune des critiques littéraires? Autrement dit, y a-t-il des écrivains dignes d'être sauvés par nos grands et vertueux pontifes littérâtreux( parfois pas très différents, dans leurs procédés et leurs diktats esthétiques, des méthodes des ayatollahs... ) et d'autres auteurs qui, bon, bof, comme ils n'ont ni un physique glamour ni une écriture géniale, ne méritent tout de même pas qu'on aille se décarcasser pour les sauver de la torture ou de la mort...?

Le texte complet de ma lettre à Taslima est téléchargeable gracieusement à la rubrique " Multimedia"